JACQUES MINIAC : 1770–1812
Maître d’équipage et corsaire.
é le 12 septembre 1770 à Saint-Servan, un des neuf enfants de Jean François Miniac (1737, St Méloir-1814, Saint-Servan ), jardinier, et de Madeleine Taillefer ( 1740-1820 ). Frère d’Antoine, de Jean Charles et de François Bernardin.
Maître d’équipage, il navigue sur des corsaires et des négriers, dans les derniers temps de la course, en Chine comme en Amérique. En Bretagne, Jacques demeure au Poncel en 1790, au Rosais en 1793 et à la Roulais en l’an 10, ainsi que sa veuve en 1819. Ces lieux sont des villages de Saint-Servan.
Le 12 août 1790 à Marseille, Jacques, vingt ans, matelot à 28, embarque sur le « Bon Ménage », navire négrier armé dans la cité phocéenne par un armateur malouin, Louis Marie Harrington, en même temps que le futur célèbre mémorialiste corsaire, Angenard, quatorze ans. Destination : l’Isle de France et l’indienne Pondichéry, dans l’Océan Indien, plaque tournante de la traite des noirs. Après une escale à Maurice, sur le chemin du retour de Pondichéry où le navire achète des produits d’échange, le négrier passe à l’Isle de France ( Ile Maurice ) en avril 1792, avant de traiter au Mozambique entre novembre et mars 1793. Entre temps, le 10 juin précédent, exaspéré par les pénibles conditions de bord, Angenard avait déserté à Port-Louis, Isle de France, et s’était fait enrôler sur le « Peggy », autre négrier, bordelais. Le 3 mai 1793, le « Bon ménage » et ses six cent soixante dix captifs sont pris par les Anglais à la vue de terre de la Guadeloupe, puis le négrier est conduit à la proche Dominique. Là, Jacques passe sur le vaisseau la « Ferme », de la station des Iles sous le vent, basé à Fort-Royal de la Martinique. De ce vaisseau commandé par le contre-amiral et chef de division Chevalier de Rivière, Jacques en déserte le 16 juillet 1793 à la Trinité Espagnole. (3) Il passe ensuite à Lodvazer où il s’embarque sur le navire américain la « Henriette ». Il en débarque le 15 octobre suivant au Havre.
Sa jeune carrière maritime se poursuit au fil des embarquements : le 26 octobre de l’an 1 (1793), Jacques est sur le « Calléo » , mais malade, il n’embarque pas. Le 4 nivôse de l’an 2,(24 décembre 1793), il est matelot sur la corvette le « Tigre », une corvette construite à Saint-Malo en 1792, puis congédié à Brest le 12 nivôse (1 janvier 1794)( 4). Le 1er floréal an 3 (20 avril 1794), il passe sur la corvette le « Mesny », négrier du richissime armateur malouin Meslé de Grandclos, beau-frère d’Harrington, négrier d’où Jacques débarque le 4 messidor avant d’embarquer sur la canonnière « Vesuve », capitaine Nicolas Guidelou, enseigne de vaisseau non entretenu. Le navire de la station de la baie de Paimpol escorte des convois entre Saint-Malo et l’Ile de Bréhat. Au large du Cap Fréhel, la canonnière est capturée par une division anglaise le 5 fructidor de l’an 3 (22 aout 1795).(5) Le 25 vendémiaire an 4 (17 octobre 1795), il passe sur le « Jacques », et est hospitalisé le 18 frimaire sur le « Bravoure », frégate d’ou Jacques déserte le 9 thermidor. Le 5 fructidor an 5, il est sur le corsaire « Oncle Tobie », désarmé à Lorien en l’an 6.
A son arrivée à Saint-Malo, Jacques s’embarque sans permission sur le « Tartare », un corsaire de 96 tonneaux, de 50 canons et autant d’hommes, armé le 13 germinal de l’an VI (1797-1798) par l’armateur de Pleurtuit Benjamin Dubois et commandé par le capitaine François Leconte. Du 2 avril au 16 mai 1798, le corsaire fait trois prises américaines, le «Jersey», le «Sally butler» et l’«Union», prises qui sont déposées à Saint-Malo et qui rapportent 662.270 francs de produits de vente et un bénéfice de 15.279 francs pour l’armement Dubois. Puis, le « tartare » et son capitaine ravisseur sont pris par les anglais le 8 prairial de l’an VI (27 mai)l. Valeur de l’armement : 55000 francs ! Le montant des parts va de 132 à 236. Jacques goûte aux prisons de la perfide Albion. Ce scénario de la prison se répètera X fois dans sa vie, confortant ce sentiment naturel de vengeance envers les Anglais. Jacques est l’objet d’un échange. En cas de capture, les corsaires sont considérés comme prisonnier de guerre. Comme tels, les échanges se font homme pour homme, grade pour grade, selon un « cartel d’échange » préétabli.
Ensuite, Jacques est revenu de prison sous le nom de Pierre Brignon ( nom d’un matelot de la corvette de Nantes, « Jean Bart » ), à bord du « Jean-Bart », lougre corsaire de dix hommes et d’une valeur d’armement de 17000 francs, armé par Fontan pour Dauchy et commandé encore par François Leconte, « Jean-Bart » auquel Jacques a acheté l’échange pour 14 louis. Leconte et son lougre viennent de déposer à Saint-Malo deux prises américaines et une anglaise, le « Cephas », faites en l’an V (1796-1797). ( 1 )
Débarqué à Morlaix le 24 floréal, Jacques est rentré chez lui sans passeport, déclarant n’avoir pas pu paraître au bureau du lieu. Pour mieux contrôler les déplacements, le gouvernement a mis en place en 93 des certificats de résidence valides trois mois, fournissant de précieux renseignements sur l’âge, l’aspect et la profession.
Toujours à Saint-Servan, Jacques, ce petit homme châtain, se marie à Bertranne Simon, une couturière, le 20 prairial de l’an VII (8 juin 1799). Veuve depuis sept ans et résidant à la Roulais, elle participera à la Congrégation des Dames en 1819.
Le 23 nivôse de l’an VIII (13 janvier 1800), Jacques est en course comme maitre d’équipage sur le « Baalgade », capitaine François Leconte, un corsaire de 166 tonneaux et 115 hommes d’équipage armé par Lesnard et Duhamel à saint-Malo, navire qui est pris par les anglais le 2 ventôse.
Le 23 pluviôse an 10 (12 février 1802), Jacques est revenu de prison à Morlaix.
An 12 (1803-1804), il est présent à la revue générale .
En l’an 13, il devient patron de péniche, du 11 juin au 10 novembre 1805, de même en l’an 14.
En 1807, Jean-Charles passe au Havre sur le « Vénus », retrouvant Guillaume-Marie Angenard comme capitaine ! - à bord duquel il échappe à un gros navire de guerre ennemi après un violent combat. Partie remise, le navire doit remettre son pavillon devant la division anglaise d’Ouessant qui le conduit à Plymouth avec respect. (7)
Il est 2ème maître d’équipage sur la frégate le « Vénus », capitaine Hamelin, à compter du 1er janvier 1808, effectuant des traversées du Havre à Cherbourg (6). Le 30 septembre 1808, Jacques a une permission à Cherbourg pour 21 jours.
Dès 1809, il passe maître d’équipage sur la frégate havraise le « Vénus », toujours capitaine Hamelin, ce jusqu’au 17 octobre 1810, joignant l’Isle de France depuis Cherbourg. (8) Arrivée à Brest le 10 mai 1810, où il est porté maître d’équipage. Un certificat du Lieutenant Hilaire, de la frégate « Vénus », daté du 1 novembre 1810, indique que « ce marin a servi sur la frégate pendant trois ans comme ? ( illisible) et s’est bien conduit. » (2).
En 1811, Jacques est congédié jusqu’à nouvel ordre de la frégate « Iphigénie », vieille frégate construite en 1777 à Solidor, frégate commandée par Emeric, de la division de Cherbourg sous le commandement du Contre-Amiral Troude. (10)
En 1812, du 16 janvier au 12 avril, Jacques embarque sur la frégate « Illyrienne », une frégate de la marine impériale mise en chantier à Solidor en novembre 1809 et lancée le 14 novembre 1811 à Saint-Servan, avec au commandement le commandant de frégate Georgette du Buisson, qui est en exercice de son équipage en rade de Saint-Malo, avant sa toute première campagne. (9)
Le 16 avril, le capitaine de frégate Dubuisson certifie que « Jacques Miniac a servi comme maître de manœuvre avec zèle, talent et distinction, et qu’il a tout lieu de se louer de son exactitude, de sa bonne conduite, perdant avec peine un bon sujet qu’il recommande à la bienveillance des officiers sous les ordres desquels il servira. »
Jacques retourne à Rochefort le 18 avril, avant l’exercice en rade de l’ « Illyrienne ». Du 28 juin au 18 décembre, il sert sur la frégate « Circée », de la station de Gironde, en qualité de maître d’équipage. Rentré à l’hôpital de la marine à Rochefort le 16 décembre 1812, il y meurt deux jours plus tard, suivant extrait mortuaire délivré le 22 janvier 1813, signé par le commissaire de Marine. Il venait d’avoir quarante deux ans, le 12 septembre précédent.
Il laisse ses deux parents, une veuve, Bertranne, qui n’a pas touché de pension, malgré ses incessantes demandes, réussissant seulement à toucher un secours de 50 francs en 1840 !