29/07/2013

Alexandre Miniac

 

Alexandre Miniac (1885-1963) est un architecte français.




Toile recadrée et représentant Alexandre, signé de  son ami Emile Aubry, Grand prix de Rome 1907.

Né le 5 juillet 1885 à Saint-Servan, en Ille-et-Vilaine, ce fils d'un négociant en tissu servannais, Paul Miniac (1851-1936), est par ailleurs frère de l'avocat général Edmond Miniac et petit-neveu de Louis Duchesne.


Alexandre en famille. La famille Miniac vers 1892-1893 ( la petite dernière, Anne, n'est pas présente, née en 1895 ). Autour de Paul Miniac et de son épouse Marie Desmonts, leur cinq enfants ( de gauche à droite : Paul née en 1883, Marie née en 1889, Edmond né en 1884, Louis né en 1887 et Alexandre né en 1885) et leur mère respective, à gauche Anne-Marie Duchesne (1825-1911) et à droite Alexandrine Desmonts née Ory (1821-1897).
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Vers 1892, la fratrie des garçons à l'école, au premier rang à gauche. Louis est le troisième en partant de la gauche.
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Alexandre, enfant, à gauche, avec son frère cadet Louis né en 1887.
Cliché d'Auguste Bonnesoeur, à Saint-Servan.

 
Anne et Marie, les deux soeurs d'Alexandre.
 



Deux joyeuses scènes de famille prise le même jour, vers 1903, représentant Paul Miniac et son épouse Marie Desmonts et quatre de leurs enfants, dont les deux filles, l'aînée Marie ( 1889-1907) et la cadette Anne (1895-1975) affectueusement appelée "Nanette". Alexandre  est-il le plus jeune des deux garçons  photographiés ?
 
Il apprend l'architecture à l'école nationale supérieure d'architecture de Bretagne, située alors au palais du Commerce, à Rennes. Inscrit à la première promotion de 1905, comptant alors deux élèves, après un concours en décembre, il a pour maîtres Emmanuel Le Ray (1859-1936) et le seul architecte diplômé exerçant alors en Basse-Bretagne, Georges-Robert Lefort (1875-1954), un architecte « au palmarès exceptionnel, auquel il ne manquait qu'un prix de Rome » (2), auteur de la gare de Dinan et de l'hôtel de la plage de Perros-Guirec.
« Deux élèves, MM. Joseph Brilhaut (1882-1968) et Alexandre Miniac, viennent d'être admissibles à la suite du jugement de la première épreuve d'architecture, parmi dix candidats ».
L'année suivante, il fut admis à la seconde classe en 1906 (13)…"ÉCOLE DES BEAUX-ARTS Concours d'admission pour la section d'architecture (section de juin-juillet) Liste des aspirants admis aux épreuves scientifiques : Mantau, Spolsky, Tortôl, Miniac, Baudrier, Dumail, ScassaJ, Vaugeofe, Lefebvre (Jean), Simon (Gabriel), Hébert, Eslotareff, carbvam, Raid,Vandry, Hugues, Croisy, Vischer, Jutot, Astruc, Azéma, Quétard, Lebel, Tord, Louis (Emile), Grapin, Gut, Maillart (Jean), Stoll, Wavre, Bouvy, Cesse-lin, Bigelow, Boranères, Guérin, Audral, Slayter" in Le Matin du premier juillet 1906.

Ouest-Eclair, Juin 1906

Septembre 1906

octobre 1906

Novembre 1906

Avril 1907


La Première Guerre Mondiale

Il y participe dans le 129e régiment d'infanterie ( Blessé au combat, Officier de la Légion d'honneur, croix de guerre 1914-1918). 

Il est cité une première fois à l'ordre du Corps d'Armée en 1916 :
"Miniac, Alexandre-Jean-Baptiste, sous-lieutenant. Officier remarquablement courageux et tranquille; dans les tourmentes les plus violentes, il s'est particulièrement distingué dans les journées du 1 au 10 juillet en déterminant les positions exactes de l'ennemi, a contribué à déchaîner sur ce dernier un tir de notre artillerie lourde, dont la violence et 1'efficacité ont arrêté une attaque, tout en donnant des résultats au-dessus de tout espoir", in Ouest-Eclair, 10 septembre 1916.


Une seconde fois, alors sous-lieutenant du 247ème régiment d'infanterie, Alexandre est cité à l'ordre du Corps d'Armée en 1917.

Ouest Eclair, 14 octobre 1917.

Le porte-drapeau est Alexandre Miniac.

Après le conflit, il sera capitaine de réserve au 129 ème régiment d'infanterie.
Ses aquarelles témoignent de sa présence comme combattant à la ferme de Moscou, face à Berry-au-Bac (Aisne) le 12 juin 1915 et à Perthes-les-Hurlus, village disparu de la Marne, le 15 août 1916, lors de la bataille de Verdun.

 
Alexandre Miniac en uniforme du 247ème régiment d'infanterie.
 
 

Architecte

Il recevait sa clientèle à son cabinet du 20 rue de Vintimille, 9e arrondissement de Paris, chaque lundi matin de 10 à 12 heures. (11) Tout comme son ami malouin Yves Hémar, architecte balnéaire de la Côte d'Émeraude, le talent de Miniac déclinant style Art déco et régionalisme s'épanouit après la première guerre mondiale.

Architecte DPLG, on lui doit des édifices privés (nombre d'hôtels et villas sur la côte basque et notamment à Saint-Jean-de-Luz...) et publics (tels que la mairie de la « ville martyre » d'Albert, dans la Somme, et son beffroi de 64 mètres de haut, bâtie en 1932 et inaugurée la même année par le président de la République Albert Lebrun), sous le mandat de Sainte-Marie Verrier.

Le projet de reconstruction de la mairie d'Albert, aquarelle d'Alexandre Miniac.
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Vendémiaire Pavot, sculpteur valenciennois, est l' auteur de la frise de la façade qui évoque les travaux des champs et les activités industrielles, le départ d'un jeune père à la guerre et son retour dans sa famille.
Georges Tembouret, maître-verrier amiénois, réalisa le vitrail du grand escalier représentant l'industrie aéronautique.
L'intérieur de la mairie est caractérisé par une décoration de style Art déco illustrant la vie laborieuse du citoyen albertin, notamment représentée par une fresque du peintre Raymond Moritz, premier illustrateur des Enquêtes du Commissaire Maigret. Ami du docteur Fernet établi à Albert, Moritz a sous doute été choisi par l'intermédiaire du praticien, alors conseiller municipal d'Albert. La famille Fernet conserve aujourd'hui des photographies de Moritz oeuvrant aux fresques.

L'hôtel-de-ville d'Albert, dans la Somme, oeuvre de Miniac.
 

À la suite d'un permis de construire en date du 16 juin 1930, il construit un immeuble d'habitation et de commerces de huit étages en 1932, dans un style Art déco, au 11-13 rue des Petites-Écuries à Paris (10e arrondissement), ceci pour le compte de l'épouse de l'hygiéniste Julian Weill-Mantou.

Avec son associé Manneval, il participe au concours pour la construction de l'hôpital d'Amiens, le CHU Amiens Nord, inauguré en octobre 1935 par le président Herriot. Le procès relatif à leur participation fait l'objet d'un arrêt du Conseil d'état en 1933.

Alexandre et Louis Duchesne

En 1922, lors des funérailles de Louis Duchesne à Saint-Louis-aux-Français à Rome, Alexandre, petit-neveu de l'académicien, représente la famille et dirige le cortège.
 
 
Sous le regard de son père Paul Miniac, poignée de mains entre Alexandre Miniac et l'abbé Henri Brémond
 lors de la réception de ce jésuite moderniste à l'Académie Française en mai 1924. Au fond, princesse de Caraman Chimay et Mr Gonse.
( Photographie de l'agence Rol, 4, rue Richer, Paris, IXème, paru dans le n° du 31 mai de la célèbree revue L'Illustration)
 
La Seconde Guerre Mondiale

En 1940, il sera fait prisonnier de guerre, emprisonné à l'Oflag XVII A, un immense camp de prisonniers de guerre pour officier, essentiellement français, situé en Autriche, à Edelbach, entre Allensteig et Doellersheim. Souvent surveillé par des vétérans autrichiens, ce camp détient le record de la tentative d'évasion de Français la plus importante de la Seconde Guerre Mondiale : 132 personnes sortirent de l'enceinte de l'oflag, presque tous repris. Fruit du travail d'une vingtaine de prisonniers, un film y a été tourné, Sous le manteau, documentaire sur la vie du camp, articulé autour d’un scénario de Robert Christophe. Plusieurs centaines de photos ont été tirées, témoignage unique des conditions de détention.
 

Urbaniste mandaté par le secrétariat d'État à la Reconstruction en 1948, avec Petit, la ville de Douai lui est redevable de son plan d'aménagement et de reconstruction après les dommages de la Seconde Guerre mondiale. Son plan est conservé aux archives municipales de Douai, exposé au musée de la Chartreuse en 1999.

Peintre

Peintre aquarelliste, il expose au Salon des artistes français des paysages du Clos-Poulet (Bazouges-la-Pérouse, Saint-Malo, Saint-Servan...) et, dessinateur, illustre des livres (tels ceux de l'ethnologue Paul Sébillot, tel La Bretagne pittoresque et légendaire, Daragon éditeur, 1911). Chaque été, il gagne Saint-Servan (12).
Marié en 1923 à Yvonne Wislin (10), fille d'un peintre montmartrois Charles Wislin (1852-1932) attaché à la Bretagne, il meurt le 3 décembre 1963, sans descendance. Son épouse fait don d'œuvres ( des dessins d'Eugène Boudin ( Le port du Havre et Le marché du Faou, deux toiles de Jules Noël, (Rue de Quimperlé et La maison de Cadet-Roussel) des primitifs flamands) à divers musées en région, musée des beaux-arts de Rennes en 1969, musée Unterlinden de Colmar en 1975, ainsi qu'un "important ensemble de papiers de Mgr Louis Duchesne" au département des manuscrits de la Bibliothèque Nationale à Paris (1972-1976).
Attaché à Bazouges-la-Pérouse, pays d'origine de Marie Desmonts, sa mère, et où il revenait régulièrement peindre dans sa maison du bourg, il y repose désormais, à l'ombre de l'église. Sa tombe est référencée dans le livre Guide des tombes d'hommes célèbres, paru en 2011 (14).


Côté jardin, la maison de sa soeur infirmière, Anne Miniac, en 1936 à Bazouges-la-Pérouse, Ille-et-Vilaine.

La même maison, côté place, la seconde en partant de la gauche.

La place, jour de marché.

La maison d'Anne, à droite donc, en amorce.
 
 
En 1994, un de ses œuvres sert de support de communication (affiche « quatre par trois ») pour la première édition de Bazouges, village d'artistes, entreprise de décentralisation artistique initiée par Bernard Hommerie durant quatre ans et aujourd'hui devenu "Le village des expérimentations artistiques" développé par la Drac Bretagne et le plasticien Loulou Picasso du groupe bazooka.
Le Cartopole de Baud, Morbihan, conservatoire régional de la carte postale, référence ainsi certaines de ses aquarelles.
Ses amis peintres, le rennais Jean Collet, dont un portrait de sa grand-mère est conservé au musée des Beaux-Arts de Rennes, et Émile Aubry (1880-1964), Grand prix de Rome en 1907 (ex-aequo avec Louis Billotey), brossent son portrait.

 


Toile d'Emile Aubry, dédicacé "A mon ami Miniac" par l'artiste, en bas à gauche de la toile.

Annexe

 
* En 1922, Alexandre Miniac est membre de la société "Le Muscadet", un société mondaine regroupant des industriels ( Louis Lefebvre-Utile, Dion,) des artistes ( Jean Emile Laboureur, Jean Coraboeuf), des architectes, des politiques (Aristide Briand, Dion, Rio, Roch), des militaires ( généraux Buat, Guillaumat), des intellectuels (Rebelliau) et organisant des banquets ( Hôtel Lutétia).
 
Ouest-Eclair, 17 décembre 1922.
 
* Existe-t-il un lien de parenté avec l'architecte Prosper Miniac, qui établit son cabinet boulevard Magenta à Rennes fin XIXe siècle (hôtel particulier référencé par l'inventaire général) ?

Sources

  1. Archives municipales de Saint-Malo, acte de naissance.
  2. Le Couédic Daniel, Les Architectes et l'idée bretonne, 1904-1945. D'un renouveau des arts à la renaissance d'une identité, édité par la Société d'histoire et d'archéologie de Bretagne, Saint-Brieuc, 1995 (page 57).
  3. Archives de l'École nationale supérieure d'architecture de Rennes, registre des élèves, transmis par Mme Réaudin.
  4. Plan original et aquarelle de la mairie d'Albert.
  5. Catalogue de l'exposition Douai, d'une commune à l'autre, XIIe ‑ XXe siècle au musée de la Chartreuse (Douai) du 23 janvier au 22 mars 1999, par Jean-Yves Clisant et Vincent Doom.
  6. Collection personnelle d'aquarelles.
  7. La Bretagne pittoresque et légendaire, de Paul-Yves Sébillot, La Découvrance éditions, 2005 (ISBN 2-84265-345-9).
  8. Arbre généalogique de la famille Miniac sur généanet.
  9. Base Joconde du ministère de la Culture.
10 : Le Journal des Débats du 2 février 1923 annonce le mariage à la mairie du 7e arrondissement de Yvonne Wistin, avec Alexandre Miniac.
11 : Annuaire des architectes (France, Algérie, Colonies), Sageret, de 1932 à 1938.
12 : Le Figaro du 11 août 1925.
13 : Les Architectes élèves de l'école des Beaux-Arts, 1793-1907, par Penanrun, Roux et Delaire, Librairie de construction moderne, 1907.
 
 
 
14 : Bertrand Beyern, Guide des tombes d'hommes célèbres, Le Cherche-Midi, 2011.
 
 
  • Texte de Daniel Le Couédic, professeur à l'université de Bretagne Occidentale, historien et architecte, à l'occasion du centenaire de l'ENSAR, en 2005.
  • Papiers de famille des ayants droit du couple Miniac-Wislin.
  • " Les archives d'architecture de la Côte Basque", Villa Natacha, à Biarritz. Notamment, "Ballade architecturale communale à Saint-Jean de Luz".
  • Claude Laroche, chercheur du Service régional de l'inventaire, rattaché à la DRAC Aquitaine, Bordeaux. Le spécialiste de l'architecture du XXe siècle au Pays basque. Auteur de Architecture et identité régional, édition le Festin.
  • Reconstruction en Picardie après 1918, Archives départementales de l'Aisne, RMN, 2000, 311 pages.


  • Ouest-France, édition Ille-et-Vilaine, 4 novembre 2008, (un témoignage sur la grande guerre au 25 décembre 1914 : « Ma chère Nanette (sa sœur, Anne), j'ai passé la nuit de Noël, comme les Mages, sous les étoiles. Vraiment c'était une belle nuit avec la lune. On aurait dit que c'était exprès. Cet après-midi, l'artillerie s'est chargée d'envoyer leur petit Noël à nos voisins et elle l'a fait largement. » Alexandre Miniac, Saint-Servan.)
Sources à consulter :

Journal des Débats : 24 juillet 1924.
L'Architecture, 15 décembre 1919.